
Recours des militaires contre une proposition d’indemnisation Brugnot ou un refus de PMI : l’expertise judiciaire suspend le délai de recours contentieux
Les militaires déçus par une proposition indemnitaire au titre de la jurisprudence Brugnot ou souhaitant contester une décision de PMI peuvent envisager de saisir le tribunal administratif d’une demande d’expertise judiciaire aux fins d’évaluer leurs préjudices.
Une telle expertise judiciaire leur permettra d’évaluer l’opportunité de faire une demande de réévaluation de la proposition Brugnot ou d’envisager un recours devant la commission des recours de l’invalidité (CRI) contre la décision PMI.
Le rapport d’expertise transmis pourra ainsi leur permettre d’appuyer et de chiffrer leurs prétentions devant la commission des recours de l’invalidité (CRI) ou la commission des recours des militaires (CRM).
La demande d’expertise judiciaire aura pour effet de suspendre les délais de recours contentieux jusqu’à la notification du rapport d’expertise.
Le cabinet d’avocat militaire, Obsalis Avocat, représente les militaires auprès des tribunaux administratifs dans le cadre de leurs demandes d’expertise judiciaire, les accompagne lors des expertises médicales et les assiste dans leurs démarches amiables ou contentieuses relatives à leurs demandes de PMI ou d’indemnisation Brugnot :
1.- L’expertise judiciaire, recours préalable obligatoire et délai de recours
. Par principe, tout recours contentieux introduit par un militaire ou un gendarme contre un acte relatif à sa situation personnelle doit être précédé d’un recours préalable (RAPO) devant la commission des recours des militaires dans un délai de deux mois à compter de sa réception (CRM) (article R. 4125-2 du code de la défense) :
« A compter de la notification ou de la publication de l'acte contesté, ou de l'intervention d'une décision implicite de rejet d'une demande, le militaire dispose d'un délai de deux mois pour saisir la commission par tout moyen conférant date certaine de réception de cette saisine au secrétariat permanent placé sous l'autorité du président de la commission. Ce délai est interrompu dans le cas où les parties engagent une médiation dans les conditions prévues aux articles L. 213-5 et L. 213-6 du code de justice administrative ».
Ainsi, un militaire qui envisage de contester un refus d’indemnisation Brugnot ou une proposition indemnitaire qu’il estime trop basse doit, en principe, saisir la commission des recours des militaires (CRM) dans un délai de deux mois.
. De même, toute procédure contentieuse contre une décision de refus de PMI ou d’attribution de PMI à un taux jugé trop bas, doit être précédé d’un recours préalable obligatoire (RAPO) devant la commission de recours de l’invalidité (CRI) dans un délai de 6 mois à compter de sa notification (article R. 711-2 du code des pensions militaires et des victimes de guerre).
Ensuite, les militaires disposent d’un délai de deux mois supplémentaires pour contester la décision prise sur leur recours préalable, qu’il s’agisse de la CRM ou de la CRI (article R. 421-1 du code de justice administrative :
« La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée.
Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle ».
Cependant, la réalisation d’une expertise judiciaire est souvent un préalable indispensable pour permettre au militaire concerné de vérifier si la décision qu’il entend contester peut raisonnablement l’être et si ses chances de succès sont suffisamment élevées.
En effet, l’expert judiciaire indépendant désigné par le tribunal administratif, évaluera ses préjudices, leur date de consolidation, leur lien avec le service, leur gravité et permettra au militaire concerné d’appuyer son éventuel recours ultérieur.
Pour obtenir la désignation d’un expert judiciaire, le militaire concerné devra saisir le juge des référés du tribunal administratif d’une requête en référé expertise au titre de l’article R. 532-1 du code de austice administrative :
« Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l’absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d’expertise ou d’instruction »
Or, entre l’introduction de la requête en référé expertise, la désignation de l’expert judiciaire par le tribunal, la réalisation de l’expertise médicale, et le dépôt de son rapport par l’expert, les délais de recours se trouvent quasi-systématiquement expirés.
Dans ces conditions, la question s’est posée de savoir si l’introduction d’une requête en référé expertise aux fins de désignation d’un expert judiciaire suspendait les délais de recours contentieux.
Le Conseil d’Etat a répondu par l’affirmative par une décision publiée au recueil Lebon le 13 mars 2009 (CE, 13 mars 2009, n°317567) :
« La demande adressée à un juge des référés d’ordonner une expertise pour rechercher les causes de dommages imputés à un service public interrompt le délai de recours contentieux contre la décision rejetant expressément la demande d’indemnité. Le délai commence à courir à nouveau à compter de la notification au requérant du rapport de l’expert ou de l’ordonnance rejetant la demande d’expertise. »
Il convient de préciser qu’il s’agit bien là d’une interruption du délai de recours et non d’une simple suspension, de sorte qu’un nouveau délai de recours de deux mois recommencera à courir à compter de la notification du rapport de l’expert ou de l’ordonnance rejetant la demande d’expertise.
Ainsi, il est vivement conseillé aux militaires déçus par une proposition indemnitaire jugée trop basse ou par un refus de PMI de prendre attache avec un cabinet d’avocat de militaires à même d’évaluer les chances de succès d’un recours direct contre ladite décision et l’opportunité d’une demande d’expertise judiciaire.
Le cabinet d’avocat militaires Obsalis Avocat représente les militaires et les gendarmes dans leurs démarches en vue de la réévaluation des propositions indemnitaires qui leur sont faites au titre de la jurisprudence Brugnot et les représente dans leurs recours contre les refus de PMI et les expertises judiciaires.
2.- Requête indemnitaire et expertise avant dire droit
En matière d’indemnisation Brugnot, il est des cas où le militaire concerné se retrouve, peu de temps avant l’expiration du délai de recours contentieux, sans avoir fait de demande d’expertise judiciaire et sans pouvoir véritablement chiffrer son préjudice.
En effet, contrairement à une idée communément admise, le chiffrage du préjudice n’est pas obligatoire au stade de la réclamation initiale (CE, 30 juillet 2003, n°244618) :
« Considérant qu'un requérant peut se borner à demander à l'administration réparation d'un préjudice qu'il estime avoir subi pour ne chiffrer ses prétentions que devant le juge administratif ; que, par suite, en jugeant que les lettres des 17 mars et 12 avril 1999 adressées par l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS à M. Y en réponse à ses demandes de réparation, dès lors que ces demandes n'étaient pas chiffrées, n'avaient pas le caractère de décisions préalables liant le contentieux, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit justifiant l'annulation de son arrêt ; »
Dans cette hypothèse, la question s’est posée de savoir si le militaire concerné pouvait déposer une requête indemnitaire non-chiffrée en se réservant la possibilité de chiffrer son préjudice ultérieurement.
Là encore, le Conseil d’Etat a répond par l’affirmative.
Dans ce cas, deux solutions s’offrent encore au militaire concerné pour chiffrer sa demande indemnitaire au titre de la jurisprudence Brugnot.
- Première possibilité : Introduire parallèlement deux requêtes, l’une en référé expertise tendant à l’évaluation de ses préjudices, l’autre indemnitaire, non chiffrée, en se réservant la possibilité de chiffrer son préjudice au regard des conclusions de l’expert (CE, 21 février 1996, n° 121766) :
« Considérant que par requêtes du même jour l'Office départemental d'habitations à loyer modéré des Hautes-Pyrénées a saisi, d'une part, en référé, le président du tribunal administratif de Pau d'une demande tendant à ce qu'une expertise soit ordonnée et d'autre part, au fond, ce même tribunal d'une demande tendant à la condamnation conjointe et solidaire de l'entreprise Lorenzi, de la société Gri, de la société des Menuiseries de l'Adour et de MM. Y..., X... et A..., architectes, à lui payer le montant des travaux préconisés par l'expert, avec les intérêts de droit à compter du jour de l'enregistrement de la requête ;
Considérant qu'en se référant dans les circonstances sus-relatées à la somme qui serait ultérieurement déterminée par l'expert, l'Office public départemental d'habitations à loyer modéré des Hautes Pyrénées a fixé le montant de sa réclamation ; que dès lors, l'Office public départemental d'habitations à loyer modéré des Hautes-Pyrénées est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Bordeaux a jugé que sa demande était irrecevable, faute de comporter l'indication de la somme réclamée et a annulé pour ce motif le jugement du tribunal administratif de Pau » ;
- Deuxième possibilité : Introduire une requête indemnitaire non-chiffrée contenant des conclusions tendant à la réalisation d’une expertise judiciaire avant dire-droit (CE, 12 décembre 2012, n°359952) :
« 2. Considérant que les actions indemnitaires dont les conclusions n'ont pas donné lieu à une évaluation chiffrée dans la requête introductive d'instance devant le tribunal administratif et ne peuvent ainsi être regardées comme tendant au versement d'une somme supérieure à 10 000 euros entrent dans le champ des dispositions du 7° de l'article R. 222-13 et du deuxième alinéa de l'article R. 811-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions ne sauraient, toutefois, trouver application quand le requérant, dans sa requête introductive d'instance, a expressément demandé qu'une expertise soit ordonnée afin de déterminer l'étendue de son préjudice ou a expressément mentionné une demande d'expertise présentée par ailleurs, en se réservant de fixer le montant de sa demande au vu du rapport de l'expert ; que le jugement rendu sur une telle requête, qui doit l'être par une formation collégiale, est susceptible d'appel quel que soit le montant de la provision que le demandeur a, le cas échéant, sollicitée dans sa requête introductive d'instance comme celui de l'indemnité qu'il a chiffrée à l'issue de l'expertise ; »
Ainsi, les militaires et gendarmes qui reçoivent une proposition indemnitaire au titre de la jurisprudence Brugnot qu’ils estiment trop basse pour réparer leurs préjudices liés à un accident de service disposent de plusieurs possibilités juridictionnelles pour faire valoir leurs droits.
Cependant, les procédures d’indemnisation sont complexes et peuvent faire l’objet de rejet pour irrecevabilité.
Il est donc vivement conseillé aux militaires et aux gendarmes qui reçoivent une proposition indemnitaire dans le cadre de la jurisprudence Brugnot, de prendre attache avec un cabinet d’avocat en droit militaire qui saura les éclairer sur les meilleures options à envisager.
Le cabinet d’avocat militaire, Obsalis Avocat, conseille et représente les militaires de toute la France dans leurs démarches en vue de la réparation de leurs préjudices liés à un accident de service, qu’il s’agisse d’indemnisations au titre de la jurisprudence Brugnot ou de l’attribution d’une PMI.
Par Tiffen MARCEL, avocate en droit de la police, au barreau de Paris
Maître Tiffen MARCEL, avocate de militaires, a fondé le cabinet Obsalis Avocat pour répondre aux problématiques rencontrées spécifiquement par les militaires et les gendarmes de toute la France. Disposant d’une expertise reconnue dans la défense des militaires, Maître Tiffen MARCEL leur dédie son expérience dans tous les domaines du droit militaire : sanction disciplinaire, CLM/CLDM et imputabilité au service, indus de rémunération, accident de service, indemnisation Brugnot, pension militaire d’invalidité (PMI), démission/rupture de contrat, réclamations indemnitaires, etc.
Pour en savoir plus sur l’indemnisation Brugnot, les PMI et les expertises judiciaires, consultez les autres articles du cabinet Obsalis Avocat sur le même thème :
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