Reprise d'ancienneté et rémunération des militaires et des gendarmes nommés dans la fonction publique

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Lorsqu'un militaire ou un gendarme est nommé dans la fonction publique civile à la suite de la réussite à un concours, qu'il ait ou non, bénéficié d'un détachement, doit se voir appliquer les règles de reprise d'ancienneté prévues par le code de la défense si elles lui sont plus favorables.

 

Le cabinet d'avocat de militaires, Obsalis Avocat, répond à vos questions : 

 

 

1.- Rémunération des militaires nommés dans la fonction publique à la suite d’un détachement

 

1.- Les différents types de détachement des militaires

 

. L’article L. 4139-1 alinéa 1er du code de la défense permet aux militaires et aux gendarmes qui remplissent les conditions, de bénéficier, d’office d’un détachement dans la fonction publique civile à la suite de la réussite à un concours :

 

« La demande de mise en détachement du militaire lauréat d'un concours de l'une des fonctions publiques civiles ou d'accès à la magistrature ainsi que celle du militaire admis à un recrutement sans concours prévu par le statut particulier dans un corps ou cadre d'emplois de fonctionnaires de catégorie C pour l'accès au premier grade du corps ou cadre d'emplois est acceptée, sous réserve que l'intéressé ait accompli au moins quatre ans de services militaires, ait informé son autorité d'emploi de sa démarche visant à un recrutement sans concours ou de son inscription au concours et ait atteint le terme du délai pendant lequel il s'est engagé à rester en position d'activité à la suite d'une formation spécialisée ou de la perception d'une prime liée au recrutement ou à la fidélisation (…) .

 

Le détachement des militaires concernés doit être accepté de plein droit s’ils ont accomplis au moins 4 années de services effectifsinformé leur autorité d’emploi de leur inscription audit concours, et atteint la limite de leur lien au service.

 

. L’article L. 4139-2 du code de la défense permet aux militaires et aux gendarmes qui remplissent des conditions de grade et d’ancienneté de bénéficier, sur demande agréée, d’un détachement dans un corps ou cadre d’emploi de la fonction publique civile :


« I.-Le militaire qui remplit les conditions de grade et d'ancienneté définies par décret en Conseil d'Etat peut, sur demande agréée par l'autorité compétente, être détaché dans un corps ou un cadre d'emplois de fonctionnaire civil relevant d'une administration de l'Etat, d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public, nonobstant les dispositions relatives au recrutement prévues par le statut particulier dont relève ce corps ou cadre d'emplois. (…) »

 

. Enfin, l’article L. 4139-3 du code de la défense permet aux militaires et aux gendarmes, sous certaines conditions, de bénéficier, sur demande agréée, d’un détachement en vue de se porter candidats à des « emplois réservés » de la fonction publique civile, c’est-à-dire, déclarés vacants :

 

« Le militaire ou l'ancien militaire peut être nommé à un emploi réservé dans les conditions prévues au titre IV du livre II du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. (…) »

 

 

1.2.- Quelle rémunération pour les militaires détachés lors de leur titularisation dans la fonction publique ?

 

L’article L. 4139-4 du code de la défense rappelle que les militaires et les gendarmes en détachement doivent percevoir une rémunération au moins égale à celle qu’ils percevaient au sein de l’armée :

« Durant le détachement prévu aux articles L. 4139-1 à L. 4139-3, le militaire perçoit une rémunération au moins égale à celle qu'il aurait perçue s'il était resté en position d'activité au sein des forces armées et des formations rattachées, dans des conditions fixées par décret. Aucune promotion n'est prononcée durant ce détachement et le militaire est radié des cadres ou rayé des contrôles de l'armée active à la date de son intégration ou de sa titularisation dans le corps ou le cadre d'emploi d'accueil. (…)

Le militaire non intégré ou non titularisé au titre des dispositions des articles L. 4139-1 à L. 4139-3 est réintégré, même en surnombre, dans son corps d'origine ou sa formation de rattachement. »

 

D’ailleurs, dans le cas où un militaire détaché serait amené à percevoir une rémunération moindre que celle qu’il percevait en qualité de militaire, son administration d’origine serait tenue de lui verser indemnité compensatrice égale à la différence entre la rémunération qu’il percevait en tant que militaire (solde indiciaire brute, indemnité de résidence, indemnité pour charges militaires, éventuels suppléments pour charges de famille, primes et indemnités liées à la qualification qu'il aurait perçus s'il était resté en position d'activité) et la rémunération qu’il perçoit en tant que fonctionnaire civil (traitement indiciaire brut, indemnité de résidence et éventuels suppléments pour charges de famille, primes et indemnités) (article R. 4138-39 II du code de la défense) :

 

«  (…) II. – Durant le détachement prévu au I, le militaire perçoit de l'administration d'accueil une rémunération comprenant le traitement indiciaire brut calculé sur la base du classement opéré en application du I, l'indemnité de résidence et, le cas échéant, les suppléments pour charge de famille ainsi que les primes et indemnités allouées au titre du nouvel emploi.

 

Dans le cas où la rémunération perçue par le militaire dans son nouvel emploi est inférieure à celle qu'il aurait perçue s'il était resté en position d'activité au sein des forces armées et formations rattachées, le militaire perçoit de son administration d'origine une indemnité compensatrice égale à la différence entre, d'une part, la solde indiciaire brute, l'indemnité de résidence, l'indemnité d'état militaire et, le cas échéant, les suppléments pour charges de famille, l'indemnité de garnison des militaires, les primes et indemnités liées à la qualification, et les indemnités différentielles liées au changement de grade qu'il aurait perçus s'il était resté en position d'activité et, d'autre part, le traitement indiciaire brut, l'indemnité de résidence et, le cas échéant, les suppléments pour charges de famille ainsi que les primes et indemnités allouées au titre du nouvel emploi. »

 

L’article R. 4139-29 I du code de la défense précise qu’à l’issue de leur détachement, les militaires et les gendarmes doivent être nommés à un grade et à un échelon doté d’un indice égal ou immédiatement supérieur à celui dont ils disposaient en tant que militaire :


« L'intégration est prononcée par l'autorité territoriale compétente. Le militaire est alors radié des cadres ou rayé des contrôles de l'armée active à la date de son intégration.


Le militaire est nommé à l'emploi dans lequel il a été détaché et classé dans le cadre d'emplois en tenant compte, le cas échéant, des responsabilités correspondant à son emploi d'intégration, à un grade et à un échelon doté d'un indice égal ou, à défaut, immédiatement supérieur à celui dont il bénéficiait en qualité de militaire. (…). »

 

Il résulte de ce qui précède qu’un militaire qui bénéficie de l’un des trois détachements prévus par le code de la défense devra, s’il est titularisé à l’issue de son détachement, bénéficier d’un classement « à un grade et à un échelon doté d'un indice égal ou, à défaut, immédiatement supérieur à celui dont il bénéficiait en qualité de militaire. (…). »

 

 

2.- Quelle reprise d’ancienneté pour les militaires lauréat d’un concours n’ayant pas bénéficié d’un détachement

 

Aux termes des alinéas 2 et 3 de l’article L. 4139-1 du code de la défense, les militaires qui sont nommés dans la fonction publique à la suite de la réussite à un concours sans passer par la voie du détachement, devraient, en principe, être titularisés dans le corps ou le cadre d’emploi d’accueil dans les conditions fixées dans le statut particulier dudit corps ou cadre d’emploi :

 

« (…) Sous réserve des dispositions de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, le militaire lauréat de l'un de ces concours, ou admis à un recrutement sans concours prévu par le statut particulier d'un corps ou cadre d'emplois de fonctionnaires de catégorie C pour l'accès au premier grade de ce corps ou cadre d'emplois, est titularisé et reclassé, dans le corps ou le cadre d'emploi d'accueil dans des conditions équivalentes, précisées par décret en Conseil d'Etat, à celles prévues pour un fonctionnaire par le statut particulier de ce corps ou de ce cadre d'emploi.

 

Lorsque le militaire ne peut bénéficier du détachement mentionné au premier alinéa, il est reclassé dès sa nomination dans le corps ou cadre d'emplois d'accueil, dans les conditions prévues au deuxième alinéa (…) ».

 

Autrement dit, la reprise d’ancienneté des militaires ainsi nommés dans la fonction publique, devrait dépendre exclusivement de ce qui est prévu dans le statut du corps ou cadre d’emploi qu’ils intègrent.

 

Toutefois, aux termes de l’article R. 4139-5 du code de la défense, les règles statutaires de classement prévues par le statut du corps ou cadre d’emploi d’accueil ne sont applicables que si elles sont plus favorables aux militaires que celles prévues aux articles R. 4139-6 à R. 4139-9 du code de la défense :

 

« Les dispositions statutaires du corps ou cadre d'emplois d'accueil demeurent applicables lorsqu'elles fixent pour le militaire des règles de classement plus favorables que celles prévues au présent article et aux articles R. 4139-6 à R. 4139-9.

 

Lorsque le classement est fonction de la durée des services militaires, la durée prise en compte pour la reprise partielle de l'ancienneté de service s'entend comme la durée effective des services, autres que ceux accomplis le cas échéant en qualité d'appelé. La durée effective de service national accompli en tant qu'appelé est prise en compte pour sa totalité en application de l'article L. 63 du code du service national.

 

Lorsque le militaire est classé à un échelon conduisant à un traitement inférieur à celui qu'il percevait précédemment, il conserve à titre personnel le bénéfice de son traitement antérieur jusqu'au jour où il bénéficie d'un traitement au moins égal dans son nouveau corps ou cadre d'emplois, dans la limite du traitement correspondant à l'échelon le plus élevé de ce corps ou cadre d'emplois ».

 

C’est ce qu’a jugé le Conseil d’Etat, par un arrêt du 18 décembre 2020 (req. n°433781) :

 

« 5. Il résulte de l'ensemble des dispositions citées aux points 2 à 4, interprétées à la lumière des travaux préparatoires de la loi du 28 juillet 2015, que lorsqu'un militaire est intégré dans la fonction publique civile en application des dispositions de l'article L. 4139-1 du code de la défense et qu'il est radié des cadres de l'armée à la date de sa nomination dans son corps ou cadre d'emplois d'accueil, quelle que soit la cause de cette radiation, il bénéficie des mêmes conditions de reclassement dans celui-ci que les militaires qui sont détachés dans ce corps ou ce cadre d'emplois sur le fondement du premier alinéa de l'article L. 4139-1. Par suite, ce reclassement doit être effectué conformément aux dispositions des articles R. 4139-5 à R. 4139-9 du code de la défense, auxquelles renvoie d'ailleurs le II de l'article 4 du décret du 29 septembre 2005 relatif à l'organisation des carrières des fonctionnaires de catégorie C. L'intéressé peut ainsi, en particulier, bénéficier de la conservation, à titre personnel, de son traitement antérieur, en application des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 4139-5 de ce code. Il peut aussi, en application du premier alinéa de cet article, bénéficier des règles de reclassement prévues par le statut de son corps ou cadre d'emplois d'accueil si elles lui sont plus favorables ».

 

En d’autres termes, un militaire qui est nommé dans la fonction publique civile à la suite de la réussite à un concours qu’il ait, ou non, bénéficié d’un détachement en application du premier alinéa de l’article L. 4139-1 du code de la défense, bénéficie d’une reprise d’ancienneté en application des dispositions des articles R. 4139-6 à R. 4139-9 du code de la défense si elles lui sont plus favorables que les règles fixées par le statut particulier du corps ou cadre d’emploi d’accueil.

 

 

3. – Quelle reprise d’ancienneté pour les militaires radiés avant leur nomination dans la fonction publique ?

 

Aux termes de l’alinéa 8 de l’article L. 4139-14 du code de la défense :

 

« La cessation de l'état militaire intervient d'office dans les cas suivants : (…)

Lors de la titularisation dans la fonction publique ou, pour les militaires qui ne répondent pas aux obligations fixées au premier alinéa de l'article L. 4139-1 leur permettant d'être détachés, dès la nomination dans un corps ou cadre d'emplois de fonctionnaires, dans les conditions prévues à la section 1 du présent chapitre ; »

 

. S’agissant de l’accès des militaires aux emplois réservés, le Conseil d’Etat a précisé que la reprise d’ancienneté ne valait que pour les militaires nommés à l’issue de leur détachement et non pour les militaires déjà radiés à la date de leur nomination (Conseil d’Etat, 20 mai 2016, req. n° 375795) :


« 3. Considérant que ces dispositions doivent être interprétées comme réservant le droit de bénéficier d'une reprise d'ancienneté au militaire qui, au moment où il a été nommé dans la fonction publique civile au titre de la procédure d'accès aux emplois réservés, a été placé en position de détachement dans l'attente de son intégration ou de sa titularisation et a ainsi conservé la qualité de militaire jusqu'à la date à laquelle celle-ci a été prononcée ; qu'en revanche, elles n'ont ni pour objet ni pour effet d'ouvrir cette possibilité de reprise d'ancienneté à l'agent qui, ayant demandé sa radiation des cadres de l'armée afin de bénéficier d'une pension militaire de retraite, n'a pas été placé en position de détachement durant la période précédant son intégration ou sa titularisation et n'avait donc plus, à la date de celle-ci, la qualité de militaire ; ».

 

. S’agissant de l’accès des militaires à la fonction publique civile à la suite de la réussite à un concours, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a jugé, dans le même sens, que la reprise d’ancienneté ne bénéficiait qu’aux militaires lauréats d’un concours, radiés le jour de leur nomination (TA Châlons-en-Champagne, 21 octobre 2022, req. n° 2102212) :

 

« 2. D'une part, aux termes du V de l'article 10 du décret du 14 avril 2006 dans sa version en vigueur à la date à laquelle M. B a été nommé élève surveillant : " Les surveillants qui avaient, à la date de leur nomination en tant qu'élève, la qualité de militaire sont classés en application des dispositions des articles L. 4139-1 et L. 4139-3 du code de la défense et des textes réglementaires pris pour leur application () ". (…)

 

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 4139-1 du code de la défense : " La demande de mise en détachement du militaire lauréat d'un concours de l'une des fonctions publiques civiles () est acceptée, sous réserve que l'intéressé ait accompli au moins quatre ans de services militaires, ait informé son autorité d'emploi () de son inscription au concours et ait atteint le terme du délai pendant lequel il s'est engagé à rester en position d'activité à la suite d'une formation spécialisée ou de la perception d'une prime liée au recrutement ou à la fidélisation / () le militaire lauréat de l'un de ces concours () est titularisé et reclassé, dans le corps ou le cadre d'emploi d'accueil dans des conditions équivalentes, précisées par décret en Conseil d'Etat, à celles prévues pour un fonctionnaire par le statut particulier de ce corps ou de ce cadre d'emploi / Lorsque le militaire ne peut bénéficier du détachement mentionné au premier alinéa, il est reclassé dès sa nomination dans le corps ou cadre d'emplois d'accueil, dans les conditions prévues au deuxième alinéa () ".

 

6. (…) dans ses écrits de défense, le garde des sceaux, ministre de la Justice doit être regardé comme sollicitant une substitution de motifs en faisant valoir que M. B, à la date à laquelle il a été nommé élève surveillant pénitentiaire le 6 novembre 2017, n'avait plus la qualité de militaire depuis le 3 février 2009. Le requérant n'apporte aucun élément, en particulier la décision le radiant des cadres de l'armée, permettant de remettre en cause la date de radiation retenue par le garde des sceaux, ministre de la Justice. Dès lors, M. B n'ayant plus la qualité de militaire à la date à laquelle il a été nommé élève surveillant pénitentiaire, le garde des sceaux, ministre de la Justice était tenu de rejeter sa demande de reprise d'ancienneté. Par suite, l'ensemble des autres moyens susvisés de la requête doivent être écartés comme inopérants ».

 

Ainsi, les militaires lauréats d’un concours, qu’ils ait ou non bénéficiés d’un détachement, bénéficient d’une reprise d’ancienneté en application des articles R. 4139-6 à R. 4139-9 du code de la défense, si celle-ci leur est plus favorable que celle prévue dans le statut particulier de leur corps ou cadre d’emploi d’accueil.

 

En revanche, les militaires qui ont été radiés des cadres ou rayés des contrôles avant la date de leur titularisation ou de leur nomination dans la fonction publique civile bénéficieront d’une reprise d’ancienneté dans les conditions prévues par le seul statut du corps ou cadre d’emploi d’accueil.

 

Les militaires qui réussissent un concours en vue d’une nomination dans la fonction publique civile doivent donc veiller à ce que la date de leur radiation des cadres ou des contrôles coïncide avec la date de leur nomination.

 

A défaut, ils prennent le risque que leur arrêté de nomination dans l’administration d’accueil ne procède pas à la reprise d’ancienneté et d’échelon prévue par le code de la défense.

 

Dans une telle hypothèse, ils leur appartiendra de contester l’arrêté de nomination en tant qu’il ne procède pas à la reprise de leur ancienneté devant le tribunal administratif compétent.

 

Le cabinet d’avocat en droit militaire, Obsalis Avocat, assiste, conseille et représente les militaires et les gendarmes dans le cadre de leurs démarches en vue d’une reconversion ou d’un départ de l’institution militaire.

 

 

Par Tiffen MARCEL, avocate en droit militaire, au barreau de Paris
 

Maître Tiffen MARCEL, avocate de militaires et de gendarmes, a fondé le cabinet Obsalis Avocat pour répondre aux problématiques rencontrées spécifiquement pas les militaires et les gendarmes de toute la France. Disposant d’une expertise reconnue dans la défense des militaires et des personnels de la gendarmerie nationale, Maître Tiffen MARCEL leur dédie son expérience dans tous les domaines du droit militaire : sanction disciplinaire, CLDM et imputabilité au service, indus de solde, jurisprudence Brugnot, procédure pénale, démission, résiliation de contrat, réclamations indemnitaires, etc.

 

 

Pour en savoir plus sur la rémunération, la reprise d’ancienneté et les détachement des militaires, consultez les articles du cabinet Obsalis Avocat sur le même thème : 

 

 

 

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