Désertion militaire : poursuites pénales et peines encourues

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La désertion est le fait pour un militaire d'abandonner son poste sans autorisation préalable de l'autorité militaire. Elle constitue une infraction pénale pour laquelle le militaire déserteur encourt de trois à dix ans d'emprisonnement.



1.- Définition de la désertion militaire


. La désertion est une infraction d'ordre militaire qui consiste, pour un militaire, à retirer, sans autorisation, son appui à une entité à laquelle il appartenait.

En temps de paix, et sur le territoire national, la désertion se définit juridiquement comme le fait, pour tout militaire :

  • De s'évader, s'absenter sans autorisation, refuser de rejoindre sa formation de rattachement ou de ne pas s'y présenter à l'issue d'une mission, d'une permission ou d'un congé ;
  • De ne pas rejoindre une formation de rattachement située hors du territoire national ;
  • De s’absenter sans autorisation du bâtiment ou de l'aéronef auquel le militaire appartenait ou à bord duquel il était embarqué, au moment du départ pour une destination hors du territoire national (article L. 321-2 du code de justice militaire).

Le fait pour un militaire d’abandonner son poste alors qu’il n’a pas obtenu l’autorisation de résilier son contrat ou de démissionner est également considéré comme une désertion (article L. L. 4139-13 du Code de la défense).

. En pratique, le militaire n’est déclaré déserteur qu’à l’expiration d’un délai de grâce de six jours à compter du lendemain du jour où l’absence sans autorisation a été constatée, ou du lendemain du terme prévu de la mission, de la permission ou du congé (article L. 321-2 alinéa 7 du code de justice militaire).

A l’étranger, ce délai de grâce est réduit à trois jours (article L. 321-5 du code de justice militaire).

Les délais de grâce sont encore réduits en temps de guerre.


2.- Peines encourues du fait d’une désertion militaire

La désertion constitue une faute disciplinaire et une infraction pénale pour laquelle le militaire concerné peut encourir :

 

  • trois ans d’emprisonnement lorsque la désertion a lieu sur le territoire national, en temps de paix (article L. 321-3 alinéa 1er du code de justice militaire)
  • cinq ans d’emprisonnement en cas de franchissement des limites du territoires national, en temps de paix (article L. 321-3 alinéa 2 du code de justice militaire)
  • dix ans d’emprisonnement en temps de guerre ou sur un territoire en état de siège ou en état d’urgence (article L. 321-3 alinéa 3 du code de justice militaire)

 


Dans tous les cas, la peine d'emprisonnement encourue peut être portée à dix ans contre tout militaire qui a déserté à l'étranger en emportant une arme ou du matériel de l'Etat, en étant de service, ou avec complot (article L. 321-7 du code de justice militaire).

3.- Procédure mise en œuvre contre le militaire déserteur

. Après constatation de la situation de désertion du militaire concerné, l’autorité militaire lui adresse une mise en demeure de rejoindre sa formation administrative, par lettre recommandé avec accusé de réception envoyée à la dernière adresse connue du militaire, en lui indiquant les conséquences disciplinaires de son abandon de poste, (article R. R4137-92 du code de la défense).

. Si le militaire n’a pas rejoint volontairement son unité à l’expiration du délai fixé par la mise en demeure, l’autorité militaire peut prononcer une sanction de troisième groupe, dont, la résiliation du contrat du déserteur et ce, sans conseil d’enquête (article R. 4137-92 code de la défense).

. En parallèle, l’autorité militaire dénonce les faits de désertion au Procureur de la République compétent pour connaître les infractions du code de justice militaire.

Le procureur de la République peut :

  • Poursuivre pénalement le militaire déserteur,
  • Lui infliger rappel à la loi,
  • Classer sans suite la procédure.


Concrètement, si le militaire concerné reprend contact avec son unité à l’expiration du délai de grâce, le Procureur de la République peut décider de classer sans suite la procédure ou décider de ne prononcer qu'un simple rappel à la loi (non mentionné dans le bulletin n°2 du casier judiciaire).

. En revanche, en cas de poursuites pénales engagées par le Procureur de la République, le militaire sera généralement convoqué par la gendarmerie ou par la police nationale en vue d’une audition libre (article 61-1 du code de procédure pénale).

Le militaire auditionné doit pouvoir s'entretenir avec un avocat de son choix dans des conditions qui garantissent la confidentialité.

L’avocat doit pouvoir assister le militaire pendant les auditions libres et les confrontations éventuelles avec d'autres personnes (camarades, supérieurs hiérarchiques, etc...), poser des questions et faire des observations écrites à l’issue des auditions.

. A l’issue de l’enquête, le militaire sera jugé devant une Chambre correctionnelle spécialisée en affaires pénales militaires près le tribunal judiciaire territorialement compétent.

 

Par Tiffen MARCEL, avocate en droit militaire, barreau de Paris
 

Maître Tiffen MARCEL, avocate de militaires et de gendarmes, a fondé le cabinet Obsalis Avocat pour répondre aux problématiques rencontrées spécifiquement pas les militaires et les gendarmes de toute la France. Disposant d’une expertise reconnue dans la défense des militaires et des personnels de la gendarmerie nationale, Maître Tiffen MARCEL leur dédie son expérience dans tous les domaines du droit militaire : sanction disciplinaire, CLDM et imputabilité au service, indus de solde, jurisprudence Brugnot, procédure pénale, démission, résiliation de contrat, réclamations indemnitaires, etc.



Pour en savoir plus :
- Placement des militaires en arrêt de travail par un médecin civil : Attention à la désertion !
- Désertion des militaires : les risques de poursuites pénales


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