
Lien au service des élèves gendarmes : pas de remboursement en cas de démission avant la nomination au grade de gendarme
Reçus au concours de sous-officier de gendarmerie, les personnels concernés se voient proposer un contrat d’engagement afin d’effectuer leur formation en école de gendarmerie, puis en unité, en tant qu’élèves gendarmes.
A l’issue de la formation, les élèves gendarmes ayant validé leur formation et disposant du permis de conduire, se voient délivrer le certificat d’aptitude gendarmerie et sont nommés au grade de gendarme.
C’est ce que l’on appelle le « passage de carrière ».
Ils s’engagent alors à rester au service de l’Etat pour une durée de 4 ans, sauf à rembourser les salaires perçus durant leur formation et leurs frais de scolarité, au prorata du temps passé.
Cette obligation ne s’applique toutefois pas aux élèves gendarmes qui démissionnent avant d’être nommés gendarmes et qui n’ont donc pas à rembourser les frais de formation.
Le cabinet d’avocat de gendarmes Obsalis Avocat vous éclaire sur les conditions et modalités de remboursement du lien au service des élèves gendarmes ainsi que sur les recours envisageables :
1.- Lien au service des élèves gendarmes : une dérogation au droit commun
. Par principe, aux termes de l’article L. 4139-13 du code de la défense, les militaires qui ont reçu une formation spécialisée, ne peuvent obtenir un agrément du ministre concernant leur demande de démission ou de résiliation de contrat d'engagement que pour des motifs exceptionnels :
« La démission du militaire de carrière ou la résiliation du contrat du militaire servant en vertu d'un contrat, régulièrement acceptée par l'autorité compétente, entraîne la cessation de l'état militaire. La démission ou la résiliation du contrat (…) ne peut être acceptée que pour des motifs exceptionnels, lorsque, ayant reçu une formation spécialisée ou perçu une prime liée au recrutement ou à la fidélisation, le militaire n'a pas atteint le terme du délai pendant lequel il s'est engagé à rester en activité. (…) ».
La liste des formations spécialisées concernées et la durée du lien au service qui leur est attachée sont fixées par L'arrêté du 4 août 2023 fixant la liste des formations spécialisées et la durée du lien au service qui leur est attachée.
La durée durant laquelle le militaire admis à une formation spécialisée s’engage à rester en service se calcule à compter de la date d'obtention du titre validant la formation ou, à défaut, de la date de la fin de la formation (article R. 4139-50 du code de la défense).
Les conditions et modalités de calcul du montant des remboursements répondent à des règles strictement fixées par les textes.
. Par dérogation, le lien au service des gendarmes résulte de textes qui leur sont spécifiquement applicables.
En effet, après réussite au concours de sous-officier de gendarmerie, les militaires sélectionnés doivent signer un contrat d’engagement leur permettant d’effectuer leur formation en école de gendarmerie, avant d’être nommés au grade de gendarme.
Concrètement, les militaires ainsi engagés en tant qu’élèves gendarmes doivent effectuer une période de formation initiale d’une durée d’un an (pouvant être prolongée jusqu’à 18 mois), comprenant une période de formation à l’école de sous-officiers de gendarmerie (ESOGN) et un stage en unité (l’article 14 du décret n° 2008-952 du 12 septembre 2008 portant statut particulier du corps des sous-officiers de gendarmerie).
Or, l’alinéa 2 de l’article 14-1 du décret précité prévoit que « Le recrutement en qualité d'élève gendarme est subordonné à la souscription de l'engagement préalable de rester au service de l'Etat pour une période de quatre ans au moins à compter de la nomination au grade de gendarme. »
Ainsi, les élèves gendarmes qui concluent un contrat d’engagement pour suivre leur formation en école de sous-officier de gendarmerie s’engagent en principe à rester en fonction pour une durée minimale de 4 années.
A l’issue de leur formation, s’ils sont parvenus à la valider et qu’ils sont titulaires du permis de conduire, ils se voient délivrer le certificat d’aptitude gendarmerie (CAG) et sont nommés au grade de gendarme, le premier jour du mois suivant la fin de la formation (Alinéa 1er de l’article 14-1 du décret précité n° 2008-952) :
« Les élèves gendarmes qui ont satisfait à la formation initiale et qui sont titulaires du permis de conduire les véhicules automobiles (catégorie B) ou du brevet militaire de conduite se voient attribuer, par décision du ministre de l'intérieur, le certificat d'aptitude gendarmerie. Ils font l'objet d'un classement par ordre de mérite et sont nommés au grade de gendarme le premier jour du mois suivant la fin de la formation ».
Le cabinet d’avocat de gendarmes, Obsalis Avocat, éclaire et assiste les gendarmes qui se voient refuser leur passage de carrière et les informe sur les recours envisageables.
2.- Démission des élèves gendarmes : quel remboursement du lien au service ?
En cas de non-respect du lien au service de 4 ans, l’article 2 de l’arrêté du 16 novembre 2023 relatif aux modalités de calcul et de remboursement des sommes dues à l'Etat en cas de rupture de l'engagement de servir des sous-officiers de gendarmerie, prévoit un remboursement dans les conditions suivantes :
« La somme forfaitaire due en application de l'article 1er correspond au montant cumulé :
- de la solde nette et, le cas échéant, de l'indemnité de résidence qu'il a perçues en qualité d'élève-gendarme ;
- des frais de scolarité, dont le montant est fixé à 2 800 euros ».
La question s’est posée de savoir si un élève gendarme qui démissionnerait avant la fin de sa formation ou, à l’issue de sa formation, mais avant d’être nommé gendarme serait tenu à un quelconque remboursement.
De l’avis du cabinet d’avocat Obsalis Avocat non, et ce pour les raisons suivantes :
. En pratique, le contrat d’engagement conclu par les militaires engagés en vue de la réalisation de leur formation d’élève gendarme fixe la durée de la formation en école de gendarmerie, la durée de la période de stage en unité et prévoit une clause stipulant que l’élève gendarme concerné « s’engage à rester au service de l’Etat pour une période de 4 ans au moins à compter de la nomination au grade de gendarme ».
Cette stipulation reprend textuellement les dispositions de l’alinéa 2 de l’article 14-1 du décret n° 2008-952 du 12 septembre 2008 portant statut particulier du corps des sous-officiers de gendarmerie.
. De son côté, l’alinéa 3 dudit article 14-1 du décret précité dispose que :
« (…) Le sous-officier de gendarmerie qui, pour toute autre cause que l'inaptitude physique, rompt son engagement doit reverser au Trésor une somme forfaitaire fixée par arrêté du ministre de l'intérieur dont le montant ne peut dépasser le montant cumulé de la solde perçue en qualité d'élève gendarme, de l'indemnité de résidence et des frais de scolarité et tient compte des services restant à accomplir (…) ».
Or, il convient de préciser qu’un élève gendarme n’est pas un sous-officier de gendarmerie.
. Enfin, l’article 3 de l’arrêté 16 novembre 2023 relatif aux modalités de calcul et de remboursement des sommes dues à l'Etat en cas de rupture de l'engagement de servir des sous-officiers de gendarmerie prévoit que le taux de remboursement s’applique en fonction du temps passé au service de l’Etat à compter de la nomination au grade de gendarme :
« La somme due en application des articles 1er et 2 est calculée de façon dégressive en fonction du nombre d'années passées au service de l'Etat, conformément aux taux fixés dans le tableau ci-après :
Il résulte de la combinaison de tous ces articles qu’en cas d’éventuelle démission ou résiliation de contrat d’un élève gendarme, en période probatoire, avant la fin de sa formation ou avant sa nomination au grade de gendarme, aucun remboursement ne pourrait lui être demandé par le trésor public.
Si tel était le cas, l’élève gendarme concerné devrait envisager de contester la décision litigieuse.
Notre cabinet d’avocat en droit des gendarmes, Obsalis Avocat, conseille et représente les gendarmes dans leurs recours, tant devant la DGFiP, la commission des recours des militaires (CRM) que les juridictions administratives.
3.- Recours des élèves gendarmes contre les demandes de remboursement de formation
Dans l’hypothèse où un élève gendarme démissionnaire, non encore nommé, se verrait notifier une décision tendant au remboursement de ses frais formations, il devrait envisager un recours.
Ce recours serait de deux ordres, selon le type de décision.
. Si la décision tendant au remboursement des frais de formation se présente sous la forme d’une décision signée par le ministère de l’Intérieur, il appartiendra à l’ancien gendarme concerné de saisir la commission des recours des militaires (CRM) d’un recours administratif préalable obligatoire (RAPO) contre ladite décision (article R. 4125-1 du code de la défense) :
« I. – Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux.
Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense.
Le recours administratif formé auprès de la commission conserve le délai de recours contentieux jusqu'à l'intervention de la décision prévue à l'article R. 4125-10. Sous réserve des dispositions de l'article L. 213-6 du code de justice administrative, tout autre recours administratif, gracieux ou hiérarchique, formé antérieurement ou postérieurement au recours introduit devant la commission, demeure sans incidence sur le délai de recours contentieux. (…) »
En cas de rejet du recours par la commission des recours des militaires (CRM), il faudrait envisager de saisir le tribunal administratif d’une requête contentieuse dans un nouveau délai de deux mois (article R. 421-1du code de justice administrative).
. Si la décision se présente sous la forme d’un titre de perception, il faudrait alors envisager de former un recours administratif préalable obligatoire (RAPO) devant le comptable public chargé de son recouvrement, autrement dit, auprès de la direction départementale des finances publiques ayant émis le titre litigieux (article 118 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, relatif à la gestion budgétaire et comptable de l'Etat)
"En cas de contestation d'un titre de perception, avant de saisir la juridiction compétente, le redevable doit adresser cette contestation, appuyée de toutes pièces ou justifications utiles, au comptable chargé du recouvrement de l'ordre de recouvrer. (...) "
La DDFiP transmettra alors le recours à son ordonnateur, qui aura alors six mois pour y répondre.
A défaut, le recours sera réputé implicitement être rejeté et le militaire concerné disposera d’un nouveau délai de deux mois pour saisir le tribunal administratif compétent :
« (…) Le comptable compétent accuse réception de la contestation en précisant sa date de réception ainsi que les délais et voies de recours. Il la transmet à l'ordonnateur à l'origine du titre qui dispose d'un délai pour statuer de six mois à compter de la date de réception de la contestation par le comptable. A défaut d'une décision notifiée dans ce délai, la contestation est considérée comme rejetée (…) ».
En conclusions, les élèves gendarmes démissionnaires avant la fin de leur formation ou avant d’être nommés gendarmes n’ont pas à rembourser leurs frais de formation.
Dans l’hypothèse où ils recevraient une décision leur réclamant une somme à rembourser, il leur est très vivement conseillé de saisir un cabinet d’avocat de gendarmes afin d’être conseillé et représenter dans ses recours.
Le cabinet d’avocat de gendarmes, Obsalis Avocat, éclaire les militaires de la gendarmerie nationale sur les recours envisageables et leurs chances de succès, et les représente devant les juridictions administratives de toute la France.
Par Tiffen MARCEL, avocate en droit militaire, au barreau de Paris
Maître Tiffen MARCEL, avocate de militaires et de gendarmes, a fondé le cabinet Obsalis Avocat pour répondre aux problématiques rencontrées spécifiquement par les militaires et les gendarmes de toute la France. Disposant d’une expertise reconnue dans la défense des militaires et des personnels de la gendarmerie nationale, Maître Tiffen MARCEL leur dédie son expérience dans tous les domaines du droit militaire : sanction disciplinaire, CLDM et imputabilité au service, accident de service, indus de solde, jurisprudence Brugnot, procédure pénale, démission, résiliation de contrat, réclamations indemnitaires, etc.
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